Je suis Jean-Paul Argudo, gérant élu de la SARL SCOP Dalibo, société d’expertise PostgreSQL (élue au niveau « Premium » par la communauté elle-même aux côtés d’autres sociétés internationales, voir http://www.postgresql.org/about/sponsors/ , tout en haut de la liste).
Je n’ai que trop d’exemples à citer qui illustrent votre propos: le contrat interministériel des logiciels libres par exemple, est toujours vécu par mes interlocuteurs comme une contrainte. Simplement, quelle que soit la société qui ait ce marché, elle ne peut être que généraliste de l’Open Source. Dans le meilleur des cas, elle sera aussi spécialisée sur quelques briques Open Source.
Hors, en ce qui concerne PostgreSQL et les projets qui y sont associées (par exemple PostGIS, pgAdmin, phpPgAdmin, PoWA, OPM, pgBadger et j’en passe), mes interlocuteurs ont besoin d’expertise. Ils sont donc obligés de trouver des moyens pour travailler avec nous via des contrats « ad hoc » comme vous dites.
J’apporte ici d’un bloc des réponses à plusieurs questions et commentaires que j’ai lu sur ce thread. C’est assez long, mais ça devait être fait:
1/ «Je n’ai pas besoin de support, je fais appel à un expert de temps en temps«
Notre expérience nous montre que nos audits suscitent beaucoup de questions et d’évolutions à posteriori. Notre but est d’assister les utilisateurs sur le long terme.
Nous avons constaté qu’un audit ponctuel de quelques jours peut certes amener des améliorations mais si ces avancées ne sont pas suivies dans le temps, leur impact tend à s’estomper lorsque l’utilisation évolue ou, simplement, lorsque le temps passe.
Sur le long terme c’est mauvais calcul et nous n’encourageons pas nos clients à aller dans cette direction: c’est PLUS CHER et MOINS EFFICACE qu’un support!
(Quasi …) Tout le monde a un contrat de maintenance pour la photocopieuse ou la machine à café de l’entreprise.
Et vous n’en auriez pas pour vos données? Sont-elles réellement moins importantes?
Enfin, un argument essentiel, c’est que le Support est notre seul récurrent! Sans celui-ci nous ne pouvons pas assurer des embauches sereinement, et surtout, contribuer à la communauté via une R&D efficace. Signer un support chez nous ou dans d’autres sociétés qui jouent le jeu de l’Open Source (autrement dit, des « pure players »), c’est vous permettre d’avoir les meilleurs experts à tout moment et de pérenniser nos entreprises. D’autant qu’il s’agit de la plupart d’entreprises de droit français et non délocalisables.
2/ Ça ferait trop de marchés à gérer!
On m’a déjà servi cet argument lors de ma visite à la Disic en 2014, plusieurs fois. Pierre-Yves là très bien dit: vous ne feriez pas de marché « pour l’ensemble des logiciels propriétaires »… Alors pourquoi le faire pour les logiciels libres? Sont-ils moins importants à vos yeux? Ce que je vois, c’est que PARTOUT dans l’administration Française, le message de la circulaire Ayrault de 2012 a été pris au pied de la lettre: ça migre de partout à PostgreSQL. Et nous ne pouvons aider que de manière sporadique les utilisateurs à y aller, car il nous est impossible d’avoir un support digne de ce nom ?!
Quel est exactement le soucis à avoir « trop de marchés à gérer »? Si on remplace à terme le marché Oracle par le marché PostgreSQL, le marché Microsoft par le marché Linux, etc… À mon humble avis c’est pareil.
Notez enfin, qu’il est beaucoup plus facile de trouver des gens compétents pour gérer des achats que des experts en logiciels libres. Dit autrement, je trouve qu’il serait dommage de limiter l’ouverture de l’état aux entreprises du logiciel libre en prétextant que cela va charger la cellule achats du gouvernement! Comprenez bien que les économies réalisées en utilisant le Logiciel Libre devraient très rapidement combler l’investissement dans les cellules achats du Gouvernement 
3/ Se grouper !
Reste que j’entends la demande d’un « Guichet Unique »… Nous avons fait une alliance de circonstance avec 2 autres sociétés du libre pour répondre à un appel d’offre d’un géant de l’énergie française. Nous attendons les résultats… Et nous avons de réelles chances de l’emporter. À ma connaissance, ça serait une première, nos 3 sociétés rassemblant un peu moins d’une 100aine de personnes, avec une expertise combinée très pointue dans plusieurs domaines, en particulier de l’infrastructure (OS, sécurité, serveurs, PostgreSQL… etc) mais aussi de la partie applicative (monde Java).
Alors voilà, si nous arrivons à transformer cet « essai » très pragmatique, nous construirons ensuite ce qui pourrait être le nouvel interlocuteur de l’état: une structure unique, sorte de « chapeau », dont les contours seraient à définir. Cette structure permettrait alors à tous les services de l’État d’avoir accès à la meilleure expertise, et en français.
Nous avons joué le jeu pendant de trop nombreuses années « avec les SSII » qui ont simplement margé sur notre dos, sans jamais nous donner une seule miette de récurrent annuel. C’est aujourd’hui terminé. Ceux là se sont enrichis grâce à nous, et à nos dépends à tous : nous parlons d’argent public.
J’arrête là, j’aurais de quoi écrire un livre sur le sujet.
Bien à vous,